Invité Invité
| Sujet: Yan Alice Matthews + La psychologie c'est l'art de faire croire aux autres que nous les comprenons. Ven 8 Nov - 15:45 | |
|
feat. Kristin Kreuk Bonjour à tous ! Mon petit nom est Yan Alice Matthews, mais vous pouvez m'appeler Yan, tout simplement. Je suis née dans la ville de Londres, en Angleterre, le 11 mai 1982. J'ai donc 29 ans (depuis 2 ans, soit 31 ans réellement) aujourd'hui, et je suis célibataire. Avant mon arrivée à Raven Hill j'étais psychologue dans le milieu carcéral (et je travaille aujourd'hui en tant que psychologue). Je suis prisonnier de Raven Hill depuis 2011, soit 2 ans. Mon physique je le dois à mes origines anglaises par mon père, chinoises par ma mère et à Kristen Kreuk qui m'a prêté son visage. Je souhaite intégrer le groupe étrangers.
Ce qui est le plus intéressant à noter chez cette psychologue est très certainement le paradoxe entre ses propres troubles mentaux et le métier qu’elle a pu pratiquer à force de persévérance. Bien entendu, il ne s’agit pas d’un trouble trop voyant, ni même handicapant dans le métier qu’elle pratique (et presque pas dans la vie quotidienne, quoi que les psychiatres l’ayant suivie aient tous eu un léger doute sur ce point). Ce n’est pas un trouble dangereux pour autrui mais bien, et seulement bien, pour sa propre personne. Yan est quasiment incapable de ressentir la peur. Cela peut paraitre parfaitement impossible, et les nombreux psychologues et psychiatres qu’elle a rencontrés se sont tous accordés à dire qu’ils n’avaient pas d’explications autre que le fait que Yan bloque d’une manière certainement inconsciente la peur que tout être humain ressent d’ordinaire, même s'ils supposent une véritable pathologie derrière ce blocage. Ils ont bien essayé diverses choses, même lorsqu’elle était enfant, pour essayer de réveiller cette peur naturelle profondément endormie. Mais rien, ni l’obscurité, ni les animaux sauvages et dangereux, ni le vide, ni même la mise en danger de sa propre vie ne semblait atteindre Yan. Elle s’excusait, toujours et encore, de ne pas être capable d’avoir peur.. Mais c’est ainsi ; elle ne peut pas paniquer, puisqu’elle n’a aucune raison de le faire. Néanmoins, ses autres émotions sont, elles, parfaitement fonctionnelles. Yan peut s’énerver – et elle se montre même parfois impulsive lorsque quelque chose l’agace particulièrement – tout comme elle peut ressentir de la joie, du bonheur ou autres sentiments et sensations.. En 29 ans d’existence, elle n’a trouvé que deux choses qui arrivent à lui faire connaitre la peur.. Et elle trouve ce sentiment parfaitement insupportable, ayant de grande difficulté à comprendre comment les personnes lambda sont en mesure de vivre en ressentant cela régulièrement..
La première des deux uniques peurs de Yan se trouve être la peur de s’engager, émotionnellement parlant, que ce soit dans une relation amicale ou dans une relation amoureuse. Elle a eut l’honneur de s’en rendre compte en tombant amoureuse d’un jeune homme, pendant l’adolescence et se mettant en couple avec lui. Étrangement, et bien qu'elle soit proche de ses parents, elle n'a jamais ce problème concernant sa famille.. Elle ne supporte pas l’idée de perdre son indépendance, de devoir rendre des comptes à quelqu’un, d’appartenir à une personne. C’est bien une chose qui lui fait perdre son sang-froid pourtant inébranlable en temps normal. Dès qu’elle a l’impression d’être trop proche d’une personne, elle peut paniquer. Tant que les gens restent des connaissances, tout va pour le mieux, Yan n’est pas une asociale en puissance, tout au contraire, elle a besoin d’un certain contact humain.. Mais dès qu’une amitié commence à voir le jour, dès qu’elle ressent un semblant d’affection pour quelqu’un, la peur qu’elle ressent alors l’étouffe plus que de raison, sûrement parce qu’elle n’a pas l’habitude de paniquer.. Quoi qu’il en soit, elle s’éloigne automatiquement des gens qu’elle apprécie trop. Elle les renie, se force à ne plus leur adresser le moindre mot, ni le moindre regard et donne l’impression de n’avoir aucun sentiment à leur égard. Si elle ne regrette pas les amitiés qu’elle détruit de la sorte, elle regrette en revanche la douleur qu’elle peut imposer aux autres. Car, même si on pourrait croire l’inverse, Yan est dotée d’un cœur et d’une certaine sensibilité.. Elle a beau être véritablement manipulatrice – déformation professionnelle, dira-t-elle, car il faut bien manipuler un peu les gens pour leur faire avouer ce qui ne va pas dans leur vie – elle n’en reste pas moins « proche » des autres, sans l’être tout à fait. Elle peut être un vrai soutien.. Mais vous risquerez de vous retrouver devant un mur lorsque l’attachement commencera à pointer le bout de son nez. Sûrement est-ce parce qu’elle n’a pas véritablement d’amis, par choix quoi qu’il lui semble que cela soit par obligation, qu’elle n’hésite que rarement à aller aborder un inconnu. Elle l’aime la notion d’inconnu. Découvrir des personnes. Et couper tous contacts avant d’avoir l’occasion de se lasser..
C’est sûrement pour cette raison, également, qu’elle apprécie tant son métier, parce qu'il n'a pas d'attachement, même s'il y a un échange. Étant d’une nature compréhensive et attentive, écouter les autres, mettre le doigt sur leurs problèmes, les pousser à assumer ce qu’il y a de négatif dans leur vie pour mieux apercevoir le positif est quelque chose qui la passionne. Elle sait se montrer d'un professionnalisme impressionnant, sans pour autant paraitre froide, lors de ses consultations.. Les longues études qu’elle a dû faire pour comprendre la psychologie humaine ont été autant d’années où elle s’est sentie indéniablement à sa place, puisque la psychologie est indéniablement sa passion première, surpassant toutes les autres.. Et ce n’est pas un hasard si elle a fini par travailler dans le milieu carcéral. Il y a quelque chose qui la pousse vers ce qui est destructeur, ce qui est violent ou ce qui est difficile à supporter. C’est plus fort qu’elle, c’est une passion. Comprendre l’esprit des gens les plus brutaux ou meurtriers est presque un besoin, et c’est sûrement ce qui la pousse parfois à s’ennuyer dans des consultations trop plates. Même si, indéniablement, entendre les problèmes des autres l’apaise. Elle s’est toujours trouvé elle-même assez étrange, dans le fond. Et elle ne le niera surtout pas. Elle apprécie cette étrangeté qui fait qu’elle est unique. Tout comme elle ne niera jamais qu’elle est bourrée de contradictions.. Elle a conscience de la plupart de ses défauts, même si elle ne travaille pas dessus pour les effacer.. Elle s’apprécie telle qu’elle est, ayant parfois ce petit côté égocentrique qui ressort d’autant plus lorsqu’elle peut prouver qu’elle est plus intelligente qu’une autre personne. Et, intelligente, elle l’est, c’est certain..
Il avait été dit précédemment que Yan avait deux, et seulement deux peurs. La seconde est une peur très particulière, qu’elle a découverte très récemment et qu’elle n’arrive pas à s’expliquer concrètement.. Alors qu’elle n’a pas bronché en se retrouvant confrontée à des araignées géantes ou lorsqu’elle a failli se faire tuer par des créatures qui aurait effrayé la plupart des personnes dites « normales », Yan n’a commencé à paniquer à Raven Hill qu’en ayant confirmation de ce qu’elle redoutait déjà ; la mort ne semble pas vouloir venir frapper les gens qui se sont aventurés dans la brume.. Yan a peur de ne pas mourir. Mourir d’une morte naturelle, s’entend.. Elle a peur d’être condamnée à vivre éternellement.. Si elle aime profondément la vie, sans pour autant y tenir finalement, elle voudrait néanmoins connaitre la mort qui, bien loin de l’effrayer, la fascine. Ce simple sujet soulève tellement d’interrogations que la curiosité et l’esprit d’analyse de Yan cherchent des réponses concrètes.. Mais sans mort, la demoiselle est convaincue qu’il n’y aura pas de réponse.. Elle ne sait pas exactement ce qui provoque la peur en elle, dans cette idée de vivre éternellement. Si c’est une peur de finir par s’ennuyer - bien qu'elle ne semble pas avoir conscience du temps qui semble s'écouler - ou une peur de finir par devenir folle à cause des questions trop nombreuses qui tournent pendant des mois, voir des années dans sa tête.. Elle est purement incapable de définir précisément la cause de sa panique lorsque cela concerne cette notion de mort qui ne viendra jamais. Tout ce qu’elle sait, c’est que cette perspective l’effraie réellement. Plus encore que le fait de s’engager émotionnellement, ce qui n’est pas peu dire. Disons qu’elle a sûrement trouvé là sa plus grande peur.. Et que cela la met dans tous ses états.. Elle n’aime pas ça. Ne plus avoir le contrôle parfait de ses réactions, d’elle-même. Avoir l’impression que c’est son corps, ses réactions primaires qui commandent et non plus son esprit et sa logique l’insupporte parfaitement.. Elle ne comprend pas la peur et elle déteste ne pas comprendre quelque chose..
Hormis tous ces côtés un peu étranges de la personnalité de Yan, on peut tout de même noter que malgré tout, elle est attachante d’une certaine façon. Toujours souriante et optimiste – le contraire est, disons, très rare – à faire des blagues, et à s’amuser, elle a un petit côté « gamin » dont elle n’a pas réellement conscience.. Mais elle peut être également une redoutable tête de mule, lorsqu’elle s’y met. Surtout lorsqu’elle pense avoir raison sur quelque chose. Têtue, très têtue, elle a bien du mal à admettre ses tords. Elle peut même se montrer blessante, lorsqu’on essaie trop de lui faire admettre qu’elle s’est trompée sur quelque chose. Néanmoins, ce côté têtu lui a permit de développer un côté déterminé et elle se donne les moyens de réussir ce qu’elle entreprend. Elle ne lâche jamais, ce n’est pas son style, et va au bout des choses car le goût de la défaite est bien trop amère pour elle. Elle n’a pas peur de se dépasser, loin de là, elle trouve même cela important pour son propre épanouissement.. Pour autant, elle ne repoussera probablement jamais ses limites dans ses relations avec les autres, à cause de sa peur qui, puisqu’elle est presque unique, est réellement usante et stressante.. En vrac, également, on peut noter que Yan est extrêmement observatrice, ce qui n’a rien d’étonnant vu le métier qu’elle exerce.. En parlant de son métier, d’ailleurs, elle ne compte jamais ses heures. Travailleuse et courageuse – ce sont bien là deux qualités qu’on ne peut pas lui enlever – elle peut travailler pendant des heures et des heures sans prendre la moindre pause.. Un conseil ; attention à sa franchise. Elle a tendance à dire les choses sans détour et à devenir parfois particulièrement acide.. Pour autant, Yan a la fâcheuse tendance à mentir.. Elle n’hésite pas à le faire, lorsqu’elle juge ça nécessaire.. Ou juste pour le plaisir de raconter des bobards, tout dépend de son état d’esprit du moment.. Et puis, étant indépendante depuis toute petite, elle a très vite appris à se débrouiller par elle-même..
En bref ? Yan est une forte-tête, cela va sans dire. Une femme étrange et peut-être un brin inaccessible, d’une certaine façon, malgré son envie d’aller vers les autres.. Pour autant, ce n’est pas une mauvaise personne. Certes, elle a de nombreux défauts, mais certainement autant de qualités.. Avec Yan, il faut juste savoir creuser un peu plus loin que ce qu’elle laisse voir, quitte à se prendre un accueil glacial en premier lieu..
| Un savant mélange des origines chinoises de sa mère et des origines anglaises de son père est visible dans les traits de Yan. Ses traits asiatiques sont joliment atténués par des traits plus britanniques, bien qu’elle conserve une peau légèrement hâlée qu’elle tient de sa mère. Ses yeux sont ceux de son père. Un joli mélange de marron et de vert, que Yan a prit l’habitude de sublimer grâce à un maquillage certes discret, mais efficace, dont elle ne veut pas se défaire. Ses cheveux, eux, sont ceux de sa mère. Parfaitement lisses et véritablement noirs, qu’elle laisse le plus souvent détachés pour ne pas les abimer, quoi qu’il lui arrive de les relever en queue de cheval lorsqu’elle ne veut pas les avoir dans le visage. Elle met un point d’honneur à rester le plus naturelle possible. Même son maquillage quotidien l’est, car elle a une sainte horreur des femmes qui se camouflent derrière un million d’artifice, au risque de ressembler à des pots de peinture.
Pour autant, Yan s’est permis la folie de se faire tatouer, lorsqu’elle était âgée de 24 ans. Deux tatouages discrets, bien que placés sur des endroits assez visibles de son anatomie malgré la présence de ses cheveux, et dont elle est plutôt fière. Sur la nuque, écrit en jolies lettres attachées, se trouve le prénom « Xiang » celui que porte sa mère. Et juste en dessous, sur la nuque également, dans la même police que pour le prénom de sa mère, est écrit le prénom « Eric » qui se trouve naturellement être le prénom de son père. Ses parents ont toujours été les deux seuls êtres auxquels Yan se soit attachés sans ressentir la moindre peur, et elle s’est fait ces tatouages pour leur rendre hommage et, d’une certaine façon, pour les avoir toujours avec elle..
En ce qui concerne sa garde-robe, autant dire que Yan n’a pas amené grand-chose dans sa valise. Quelques pantalons sobres et sombres, des hauts tout aussi sombres et sobres.. Yan n’a jamais eu un style trop extravagant.. Néanmoins, elle s’est toujours refusé à porter des robes, et n’a donc que des pantalons.. Il est également rare, très rare de la voir sans une paire d’escarpins aux pieds. Elle possède également une multitude de bijoux. Des boucles d’oreilles, notamment, ainsi que des bagues de toutes les couleurs et de toutes les formes. Yan aime bien être un minimum coquette et prendre soin d’elle. Même si elle reste naturelle, elle ne voit pas le mal à se parer de quelques bijoux..
|
« Yan ? Mais pourquoi tu veux l’appeler Yan ? Tu as conscience d’à quel point elle va souffrir, dans son existence, si on l’appelle ainsi ? » Un sourire, pourtant, un brin moqueur. C’était un sourire qui étirait les lèvres d’Eric Matthews, alors qu’il jouait avec une mèche de cheveux de sa chère et tendre fiancée. Une chinoise, à l’accent prononcé et à la culture si différente de la sienne. C’était ce qui lui avait plu. Cette différence de culture. Cette richesse, dans leurs échanges. Il apprenait tous les jours à ses côtés et l’inverse était vrai également. Et c’était avec son accent typique qu’elle lui avait répondu. Qu’elle lui avait expliqué le sens du prénom « Yan » en chine. Femme sublime et resplendissante.. Xiang disait que cela lui porterait chance. Que son prénom déterminerait ce qu’elle serait et la façon dont elle s’en sortirait dans la vie. Xiang avait raconté à Eric qu’elle connaissait une Yan. Une femme merveilleusement belle, et douée, qui avait réussi l’exploit d’avoir un métier d’homme, tout en étant respectée dans ce qu’elle faisait. « Je veux qu’elle s’appelle Yan. Car cette femme m’a toujours fait rêver. S’il te plait. » Eric soupira. Et acquiesça. Il n’allait pas priver sa douce de ce prénom dont elle avait tant envie, tout en imposant un prénom, lui aussi. Alice. Car, selon ce professeur de littérature, Alice représentait la force de la curiosité, et la sagesse de l’apprentissage. Que les Alice étaient des femmes fortes, et caractérielles, mais intéressantes. Xiang avait sourit. Et elle aussi avait acquiescé. Yan Alice Matthews. C’était là l’identité que ce couple avait choisi pour l’enfant à naître.
« Chérie, as-tu vu Yan ? » Xiang secoua la tête. Non, elle ne l’avait pas vu depuis le repas du midi. Sûrement jouait-elle dans sa chambre, comme elle le faisait si souvent. Le temps avait passé, depuis cette conversation sur le prénom de l’enfant. Cinq années, douces et tranquilles, autant que pouvait l’être la vie de la famille Matthews. Xiang avait réussi à trouver l’emploi de ses rêves à 33 ans déjà ; elle travaillait pour un musée, en tant qu’historienne d’art. Quant à Eric, il semblait plus que passionné par son métier de professeur de littérature, bien qu’il se soit mis en tête d’écrire un roman dont il refusait systématiquement de parler, prétextant que cela lui porterait malheur. Ils menaient une vie plutôt confortable, et n’avait pas hésité à acheter l’appartement au sixième étage en plein cœur de Londres dans lequel ils vivaient désormais. Un appartement plutôt imposant et agréable, à la décoration chaude et conviviale. Les Matthews avaient toujours été des personnes particulièrement conviviales, par ailleurs, et c’était pour cette raison qu’ils avaient décidé de vivre en immeuble, entretenant des relations particulièrement positives avec leurs voisins. Cela leur semblait être particulièrement important, pour leur propre équilibre. Et un bon exemple pour leur fille. Leur petit trésor. Ce qu’ils avaient de plus précieux au monde.. Leur petite princesse qui, à cet instant, n’était pas en train de jouer dans sa chambre. « MAMAN ! MON BALLON EST PARTI ! » Elle pleurait. Et Xiang ne mit pas à longtemps à courir jusqu’à la fenêtre grande ouverte, manquant de peu de faire un infarctus en voyant sa tendre progéniture en train d’escalader courageusement la balustrade du balcon. « Je vais le rattraper ! » Xiang eut tout juste le temps de rattraper sa fille par le bras, violemment, avant que celle-ci ne bascule tout à fait de l’autre côté du balcon. Elle se prit une gifle monumentale, sans trop en comprendre la raison. Une gifle qui résonna dans tout l’appartement. Et lorsque sa mère lui hurla en chinois qu’elle aurait pu se tuer, la seule réaction de Yan fut de dire qu’elle était désolée. Rien de plus. Ce fut le début d’une grande série d’actes particulièrement inconscients de la part de l’enfant. Et le début d’une inquiétude grandissante chez ses parents, venant troubler le calme de leur petite vie tranquille.
« Pourquoi je dois aller voir un médecin ? » Yan avait six ans. Et elle venait de lâcher cette question avec une neutralité exemplaire, regardant avec une curiosité certaine les visages des enfants qui attendaient eux aussi dans la salle d’attente. Un pédopsychiatre, avaient dit ses parents. Elle remuait ses jambes, attendant que son père lui explique. « Parce que tu n’as peur de rien, princesse, et que ça devient dangereux. » Elle eut un sourire désolé, puis posa sa tête sur le bras de son père. Elle était réellement désolée de faire ainsi de la peine à ses parents. Elle voyait bien qu’ils n’allaient pas bien. Elle ne comprenait pas tout à fait lorsqu’ils disaient qu’ils étaient inquiets. C’était une notion abstraite, dans son esprit. Elle ne savait pas ce qu’était l’inquiétude. Ou la peur. Elle ne ressentait pas cette adrénaline, cette sensation de danger. Jamais. Elle pouvait bien se jeter du haut d’un pont, sans rien ressentir d’autre que l’attente avant de s’écraser au sol. Xiang et Eric voulaient comprendre. Yan, elle, ne se rendait même pas compte que c’était un problème en soit. Bien sûr, l’école appelait souvent pour la renvoyer le temps d’une journée, car elle « se mettait en danger de manière significative » et que l’école « ne pouvait pas prendre la responsabilité des actes quasiment suicidaires de Yan » tout en ajoutant qu’il n’était pas normal qu’une enfant de six ans se comporte comme elle le faisait. Non, il n’était pas normal qu’une enfant de six ans décide de s’étrangler avec son écharpe par curiosité. Il n’était pas non plus normal qu’une enfant de six ans décide de sauter du haut d’un étage pour voir si elle pouvait voler. C’était l’école elle-même qui avait fortement « conseillé » à Eric et Xiang d’emmener Yan voir un pédopsychiatre. Lorsque l’homme, le Docteur Huntingdon, se présenta, ni Yan, ni ses parents ne pensaient que le suivi psychologique de l’enfant durerait si longtemps.. Et pourtant..
« Cela fait maintenant plus de deux ans que nous suivons votre fille, et malgré tout, nous n’arrivons pas à statuer précisément sur le trouble psychologique l’empêchant de ressentir ainsi la peur. Nous pensons à un blocage psychologique de sa part, mais cela peu cacher une pathologie peut-être bien plus grave. Elle n’a pas de réel instinct de survie, puisqu’elle ne ressent pas le danger.. Et ce petit détail s’avère être particulièrement gênant pour son propre bien. Ce n’est pas avec des consultations externes que nous arriverons à vous offrir et à lui offrir une solution. Sachez-le. » Eric tapota pensivement le dos de sa femme, alors que Yan dessinait un peu plus loin. L’air grave, il semblait évident que le Docteur Huntingdon était en train de proposer subtilement à Mr et Mme Matthews de faire interner leur fille. « Comprenez bien que cela l’handicapera tout au long de sa vie. Certes, vous lui avez appris – et fort heureusement – qu’elle ne devait pas faire certaines choses. Mais elle n’en comprend pas les raisons, et je crains qu’à l’adolescence, lorsqu’elle voudra faire ses propres expériences, vos recommandations n’aient plus de réels impacts. Admettons que je vous interdise de manger une friandise, en vous donnant une raison qui ne semble uniquement valable que pour ma personne.. N’aurez-vous pas l’envie de manger cette friandise, rien que par curiosité ? A l’heure actuelle, votre fille n’a que huit ans et vous pouvez sans nul doute être très fiers de l’éducation que vous lui avez donné, car elle vous écoute et ne remets pas en cause ni votre autorité, ni votre parole. Mais qu’en sera-t-il lorsqu’elle aura 14 ou 16 ans ? » Xiang se sentait défaillir. Jamais elle n’aurait cru pouvoir entendre tout cela concernant son enfant.. Ce fut elle qui posa la question la plus pertinente de l’entretien. Elle, qui demanda au médecin ce qu’il leur conseillait. « Un internement, dans un institut spécialisé. Ce n’est rien de grave, et nous sommes bien loin des années où les hôpitaux psychiatriques étaient considérés comme des asiles pour fous. Ce n’est que pour assurer un suivi et un encadrement à Yan. Pour travailler, avec elle et au quotidien, sur son trouble. Parfois, séparer les enfants de leur milieu de vie, de leurs habitudes, permet de rétablir un certain équilibre psychologique. Si j’avais trouvé une autre solution, je ne serai pas en train de vous proposer celle-ci. Mais, mes collègues et moi-même ne sommes pas en mesure de venir en aide à Yan. Pas dans l’état actuel des choses, du moins. En deux années de suivi mensuel, nous ne sommes pas parvenus à un résultat concluant. » Le mot était tombé. Faire interner leur fille.. Il fallut plusieurs semaines à Eric et à Xiang pour encaisser le choc. Pour accuser le coup.. Et pour prendre enfin une décision, après que Yan se soit de nouveau mise en danger sans s’en rendre compte. Elle avait besoin d’aide. Et il était de leur devoir de parents de lui en fournir une. La décision qu’ils prirent fit réellement souffrir Xiang. Elle n’arrivait pas à croire qu’elle avait accepté de faire enfermer sa fille.. Yan, quant à elle, ne comprenait pas. Elle acceptait, simplement. On lui avait dit que c’était pour l’aider, qu’elle irait mieux après ça.. Alors, elle avait dit qu’elle était d’accord, et elle avait fait son entrée dans le centre avec le sourire.
« Non, ça ne m’effraie pas. Ce n’est qu’un animal. » La petite voix de Yan était neutre, alors qu'elle regardait l'imposant félin à travers la vitre. Sortie au zoo. Un moment pénible pour Yan, alors qu’elle était internée dans un hôpital psychiatrique pour mineur de moins de 10 ans depuis un peu plus de quatre mois. L’éducatrice l’avait fait s’arrêter devant la cage des lions, regardant l’air stoïque de l’enfant. « Il ressemble à un énorme peluche. Vous pensez que j’aurais le droit d’aller le toucher ? » Le lion se réveilla, laissant un long bâillement sonore et proche d’un rugissement sortir de sa gueule, tandis que Yan le regardait avec plus d’intérêt encore.. Et ce qui devait être un beau moment d’émerveillement fut gâché par les trop nombreuses questions de la femme. Yan n’aimait pas ce centre. Et toutes ces questions, tous ces ateliers qui ne servaient qu’à faire passer le temps, selon elle. Elle avait beau s’excuser de ne pas avoir peur, rien ne semblait marcher.. Elle avait la sensation de subir, plus que vivre.. Et elle trouvait cela parfaitement insupportable. Elle avait envie d’aller à l’école, de retrouver sa chambre et ses jouets.. Mais non. Elle n’avait pas le droit de quitter cet endroit. Et les sorties lui semblaient toujours être un calvaire, car tout été prétexte à de nouvelles questions.. Des questions pour rien, elle le savait. Car le psychologue et le psychiatrique qui la suivaient dans ce centre étaient aussi perplexes que le Docteur Huntingdon fassent à sa « particularité » et n’arrivait pas à coller un nom de pathologie quelconque. A la question « Est-ce que tu te forces à ne pas avoir peur ? » Yan avait réellement rit, avant d’assurer que non et que si ça pouvait la faire sortir d’ici, elle voulait bien avoir peur.. Pourtant, elle avait conscience que les médecins, les éducateurs et toutes les personnes présentes dans ce centre étaient là pour l’aider. Elle le comprenait, même si elle avait du mal à l’admettre.. Et elle faisait des efforts, suivait les ateliers, jouait le jeu des consultations.. La seule chose qu’elle avait refusé de subir avait été un traitement, auquel elle avait très mal réagit et qu’on lui avait enlevé très rapidement.. Il lui fallut attendre deux mois supplémentaires, soit six mois dans ce centre, avant que les médecins ne décident que l’internement n’était pas nécessaire, tant qu’il y avait un suivi en hôpital de jour.
« Bien. Nous ne pouvons pas garder Yan éternellement.. Votre fille est absolument stable, si l’on met de côté son absence de peur. Nous avons installé avec elle un rituel, chaque soir, avant de dormir. De tous les événements de la journée, nous essayions de voir ensemble si elle savait – par apprentissage ou par instinct – lesquels semblaient dangereux pour elle. Elle arrive plus ou moins à s’exprimer là-dessus. Elle fait des efforts, néanmoins, et est très réceptive à un suivi psychologique. Je recommande qu’elle rentre à votre domicile, tout en ayant un suivi en hôpital de jour, pour continuer quelques ateliers visant à stimuler son instinct de survie et son instinct de peur. Ne vous inquiétez pas, Mme Matthews. Votre fille a les moyens de s’en sortir. Elle fait de nombreux efforts, dont toute l’équipe médicale a été témoin pendant son séjour ici. Malheureusement, je ne suis toujours pas en mesure de vous fournir une réponse concrète sur le trouble dont souffre Yan. Il semble clair que c’est involontaire et qu’elle serait ravie d’avoir peur.. Nous savons qu’elle souffre d’un trouble léger, voir moyen, du comportement. Mais nous ne pouvons pas nous avancer davantage sur une quelconque autre conclusion. » Il marqua une légère pause « Nous avons essayé de mettre en place un traitement, comme nous vous en avions parlé. Mais Yan a davantage tendance à se renfermer avec un traitement chimique. Nous avons vu une très nette différence entre sa façon d’aborder les ateliers, les sorties et les consultations lorsqu’elle été sous traitement chimique et lorsqu’elle n’y été pas. Voilà donc ce qui est prescrit ; pour le moment, trois demi-journées en hôpital de jour, afin de continuer avec elle les ateliers mis en place pendant son placement dans notre centre. Elle peut, et a envie, de retourner à l’école. Je vous encourage donc à la re-scolarisée au plus tôt, mais peut-être avec des horaires aménagées. Et, enfin, écoutez-la et discutez avec elle. Si elle est suivie correctement, nous pourrons peut-être réussir à comprendre d’où vient le trouble, et comment le combattre. Pour le moment, le principal est d’avoir à la place de Yan, et pour elle, l’instinct de survie qu’il lui manque. C’est une petite fille avec une volonté de bien faire évidente. C’est aux adultes et professionnels que nous sommes de lui tendre la main pour l’aider et la guider. Mais il est clair qu’actuellement, si votre fille doit rester encore un mois de plus ici, elle finira par se renfermer tout à fait sur elle-même. Elle a eut beaucoup de coups durs et a toujours attendus avec impatience les visites du week-end pour vous retrouver. Elle a grand besoin de votre présence, Monsieur, Madame. Grand besoin. »
Qu’elle avait besoin de ses parents, Yan ne l’avait jamais caché. Ils étaient tout pour elle. Et elle les aimait d’un amour sensible, et vrai. Rentrer chez elle avait été un soulagement, et le suivi psychologique – bien que lourd – lui paraissait plus facile à supporter. Elle pouvait retourner à l’école, mais ses nombreuses absences la rendaient étrange aux yeux des autres enfants. D’autant qu’elle ne voulait jamais en parler, qu’elle restait dans son petit coin, à regarder les autres vivre. Elle ne voulait pas faire de faux pas. Et elle ne savait que peu ce qu’elle avait le droit de faire, ou non. Dès lors, elle commença à beaucoup observer. A voir les jeux des autres enfants, à en comprendre les règles sans y participer. Et elle rattrapa le temps qu’elle avait perdu loin de l’école. Elle aimait l’école. Elle aimait apprendre des choses et pouvoir penser à autre chose qu’à ses troubles du comportement. Aller à l’école était une libération. Un moyen de se sentir « comme les autres » même si les autres la mettaient de côté. Et, à l’hôpital de jour, c’était elle qui mettait les autres enfants de côté, considérant qu’elle n’était là que pour « guérir ». Elle ne se fit pas d’amis. Tout au plus des connaissances avec lesquelles elle jouait de temps en temps.. Mais elle ne s’attacha à personne. Et puis, elle préférait observer. Se taire et écouter. Et ce fut ainsi jusqu’à ses 15 ans. Si elle avait arrêté les demi-journées en hôpital de jour à l’âge de 13 ans, elle n’avait pas perdu cette habitude d’être seule. Elle voyait toujours une psychologue, une femme du nom de Nolwenn Lafay, avec laquelle elle s’entendait à merveille.. « Est-ce que c’est long, de devenir psychologue ? » La femme avait rit doucement, avant de demander à Yan si c’était là le métier qu’elle voulait faire « J’aimerais. Vous savez, je vois des psychologues et des psychiatres depuis que j’ai six ans.. Et c’est un métier qui me fascine. Je vois bien toutes les notes que vous prenez, toutes les questions parfaitement ciblées, l’écoute attentive, la compréhension. Vous me poussez à réfléchir, à prendre des chemins que je n’aurais pas pris seule. Je suppose que vous devez mettre en relation toutes les conversations que nous avons, que vous devez en faire un résumé pour mieux analyser tout ceci. Qu’est-ce qui vous a poussé à devenir psychologue ? Par envie ? Par passion ? » Yan était curieuse. Sûrement trop.. Mais lorsqu’elle ressortit de cette séance chez le psychologue, elle annonça fièrement à ses parents qu’elle avait trouvé le métier qu’elle voulait faire. Xiang et Eric auraient pu croire que leur fille aurait en horreur tout ce qui se rapportait de près ou de loin à la psychologie et à la psychiatrie.. Mais c’était tout l’inverse.. Elle en était passionnée. Et sa psychologue la poussait dans cette voie, si c’était là ce qu’elle aimait faire.. Yan en était certaine ; elle deviendrait psychologue. C’était ce dont elle avait envie. Et têtue comme elle l’était, ses parents ne doutaient pas un seul instant qu’elle finirait par y arriver.. Et puis, il y eut ce type. Marc. Un jeune homme de 17 ans, charmant quoi qu’un brin mauvais garçon. Ce type qui perturba grandement Yan.
Ils s’étaient rencontrés à la sortie des cours.. Lui, avec sa cigarette coincée entre ses lèvres à attendre sa petite copine du moment, et elle, sortant des cours avec les écouteurs de son baladeur dans les oreilles, à écouter du vrai et bon hard rock à grand volume. Il s’était approché d’elle, avec un sourire, avant de lui parler. Cela avait fait sourire Yan, de le voir bouger ses lèvres sans entendre un traitre mot de ce qu’il racontait. Elle avait ôté ses écouteurs, s’était excusée, avant de lui demander de répété. A nouveau, il lui avait demandé si elle connaissait Shirley, et si, par hasard, elle l’avait vu.. « Nop. Désolée. » Ça aurait pu s’arrêter là, si Marc n’avait pas poursuivi en demandant à la demoiselle son prénom, puis son âge.. Si bien qu’une discussion avait commencée entre eux. Une discussion durant laquelle ils s’étaient découvert une complicité rapide.. Quelque chose que Yan n’avait jamais connu auparavant « Tu me raccompagnes jusqu’à chez moi ? » lui proposa-t-elle, avant de rire face à la réaction de Marc qui lui demanda si elle avait peur de rentrer seule « Je n’ai peur de rien, c'est plutôt ça le problème.. Mais ça, on en reparlera plus tard.. Alors, oui ou non ? » Marc avait accepté, tout en oubliant cordialement sa petite copine du moment et tout le reste.. Lequel des deux tomba amoureux de l’autre le premier ? Ce fut Marc, sans doute.. Marc qui revenait tous les jours pour venir chercher Yan. Marc, qui ne se lassait jamais du caractère bien affirmé de la jeune fille. Elle savait lui tenir tête, rire avec lui.. La jeune fille était certainement amoureuse, elle aussi.. Mais elle ne l’admettait pas. Même pas à elle-même. Et leur complicité crevait les yeux.. Il devenait le premier ami de la métisse, et ne plus être seule lui faisait réellement bizarre, sans pour autant que cette bizarrerie ne la dérange vraiment. Elle appréciait la présence de Marc.. « Et ta copine, qu’est-ce qu’elle pense de tout ce temps que tu passes avec moi ? » Marc eut un rire spontané « Elle ? Comme si j’étais toujours avec elle.. » Avec une douceur sans nom, il s’approcha du visage de Yan, caressa sa joue avant de venir poser ses lèvres sur celles de la jeune demoiselle. « Qu’est-ce que tu fais ?! » Ce fut la seule réaction de Yan.. Juste avant qu’elle ne se lève précipitamment pour reculer, fixant Marc. Son cœur battait trop rapidement, elle avait mal à la poitrine, elle avait le vertige, la nausée et l’impression qu’elle allait s’évanouir. Elle avait plus chaud d’un seul coup, et l’envie de pleurer « Sors.. Sors de chez moi ! » Elle ignorait totalement ce qu’il lui arrivait, mais elle se mit à trembler lorsque Marc s’approcha d’elle. A trembler violemment. Elle qui n’avait jamais eu peur de son existence avait eu peur.. d’un baiser ? Marc ne comprit pas la réaction de Yan. Elle-même ne la comprenait pas, mais les larmes coulaient toutes seules sur ses joues, et la terreur se lisait dans son regard. Elle perdait ses moyens. Elle perdait tous ses moyens. Elle lui hurla à nouveau de partir, faisant venir son père dans la pièce. En voyant sa fille recroquevillée dans un coin de la chambre, en train de trembler comme jamais elle n’avait tremblé de toute sa vie, à essayer de fuir tout en étant coincée par le mur, il eut un moment d’incompréhension, avant de se tourner vers Marc. « Qu’est-ce que tu lui as fait ? » Une colère sourde perçait dans la voix de ce père « Répond. » Et l’adolescent restait planté là, à essayer de s’expliquer, sans y parvenir.. Ne comprenant rien à la situation, il décida de simplement prendre la fuite.. Et, à peine fut-il sorti de la pièce que Yan se précipita dans les bras de son père. « Papa.. J’ai eu peur, Papa.. » Elle continuait à sangloter..
Et elle alla voir sa psychologue le lendemain. Elle restait dans un état de terreur jamais vu, craignant soudainement tout et n’importe quoi. Elle ne le supportait pas. Elle ne supportait pas de ressentir la peur. Mais tout l’effrayait, comme si une barrière s’était brisée dans son inconscient. Le bruit des voitures, une porte qui se ferme.. Elle hurlait, tant elle avait peur. Et lorsqu’il fallut sortir de chez elle pour aller jusqu’au cabinet de sa psychologue, cela lui sembla la pire épreuve de son existence. Elle s’accrochait de toutes ses forces à son père, n’arrêtait pas de supplier pour que tout ceci s’arrête.. Elle refusa que son père ne la laisse seule avec la psychologue. « Yan, calme-toi, Yan.. C’est toujours moi, tu sais ? Je suis toujours Mme Lafay, tu te rappelles de nos conversations ? Yan, regarde-moi s’il te plait. » Yan cacha son visage dans le cou de son père, lui arrachant presque les cheveux tellement elle serrait fort sa nuque. La psychologue fit un « non » de la tête à Eric. « Il faut la laisser seule avec moi, Monsieur.. Je sais que ce n’est pas facile.. Mais je n’arriverais à rien si vous restez dans cette pièce. » Yan hurla qu’elle ne voulait pas qu’il l’abandonne, essayant de s’accrocher à lui pour ne pas qu’il sorte de la pièce.. Et elle continua à hurler, à la manière d’une enfant, tout en tambourinant la porte. Aucun dialogue n’était possible.. La psychologue fut même forcée de faire intervenir un psychiatrique du cabinet pour administrer à Yan un calmant. L’entretient qui suivit avec Eric, alors que Yan avait fini par s’endormir, dans les bras de son père, ne fut pas des plus joyeux. « Votre fille est traumatisée, Monsieur Matthews. Réellement traumatisée. Est-ce qu’il lui est arrivé quelque chose, en particulier ? » Il caressa les cheveux de son enfant. « Son petit-ami est venu à la maison, hier. J’ignore ce qu’il s’est passé.. Mais je suis intervenu en l’entendant crier.. Marc ne semblait pas comprendre non plus.. » Elle nota « Est-il du genre violent ? Ou pourrait-il l’être ? » Eric secoua négativement la tête « Il se donne des airs de chenapan, mais il n’est pas du genre à faire du mal à quelqu’un. Et je lui ai déjà parlé, nous avons déjà discuté de Yan, parce que je tenais à mettre les choses au point avec lui concernant la maladie de ma fille.. Il a été plus que correct, poli, et j’ai bien senti qu’il tenait à elle. Qu’il était amoureux. C’était même mignon, vous savez. Mais Yan, elle, disait souvent qu’il n’était qu’une connaissance. Qu’elle ne voulait pas qu’il soit autre chose qu’une connaissance. » Elle posa son stylo, et retira ses lunettes « Monsieur Matthews.. Votre fille souffre d’un trouble moyen du comportement, et d’une pathologie qui nous est totalement inconnue. Les conséquences d’une relation aussi forte peuvent être, chez elle, particulièrement difficiles à vivre. » Il baissa le regard « Mais je n’allai pas l’empêcher de vivre, non ?! Elle n’a jamais eu d’amis ! Je trouvais ça bien, positif, que Marc soit entré dans sa vie ! » La psychologue posa une main sur le bras de l’homme « Ce n’est pas de votre faute. Mais je vous explique les faits. Je pense, maintenant, qu’il vaut mieux faire hospitaliser votre fille. Au moins le temps qu’elle puisse se calmer et reprendre ses esprits. »
Pour la seconde fois, en 15 ans d’existence, Yan fut internée en hôpital psychiatrique. Ses crises de panique continuèrent pendant plusieurs semaines, avant de commencer à se calmer doucement, puis à disparaitre tout à fait, lui rendant sa neutralité ordinaire. Elle demanda même à voir sa psychologue. Et pas une autre. Elle était formelle sur ce point ; elle ne voulait parler qu’au Pr Lafay, et à personne d’autre. « J’ai eu peur d’un baiser.. Je.. Je ne suis pas normale.. Qu’est-ce qui ne tourne pas rond chez moi ? » La femme secoua doucement la tête « Yan, parler d’anormalité serait un peu fort. Tu as simplement été dépassée par les événements. Par ce que tu ressentais, peut-être. Qu’est-ce qui t’as fait le plus peur ? Le baiser, ou l’impression que ce dit-baiser donnerait une tournure plus officielle à ta relation avec ce jeune garçon ? » Une longue conversation débuta, pour essayer de connaitre avec précision la cause de la panique qu’avait ressenti Yan. La raison apparut finalement assez clairement ; l’engagement émotionnel. Peut-être était-ce dû au fait que Yan avait toujours dû faire plus ou moins face à la solitude, ou parce qu’elle était une personne d’une nature plus qu’indépendante.. Toujours était-il qu’elle avait peur de l’engagement. Il restait à définir si cela ne concernait que le domaine amoureux, ou si ça s’élargissait au domaine amical.. Mais ça, Yan n’avait pas très envie de le découvrir. La peur n’était pas un sentiment qu’elle souhaitait ressentir à nouveau.. C’était bien trop violent. Bien trop difficile à surmonter.. Elle ne comprenait tout simplement pas comment un être humain pouvait ressentir de telles émotions régulièrement sans en être profondément anéanti.. Dès lors, Yan se fit la promesse de ne plus s’attacher à quiconque. Considérant qu’elle devait tout de même une explication à Marc, elle lui fit parvenir une lettre où elle lui expliqua tout.. Et coupa définitivement les ponts avec lui.
Elle se concentra alors sur ses études, se renfermant complètement. Étonnement, être proche de ses parents comme elle pouvait l'être n’avait aucun impact sur sa maladie. Sa psychologue lui expliqua que ce devait être parce qu’elle ressentait un sentiment de légitimité à cette relation et que, par conséquent, elle l’acceptait parfaitement. Et cela lui allait très bien. Elle eut ses diplômes avec une certaine facilité, devenue un véritable bourreau de travail qui ne semblait vivre que pour ses cours, et intégra une faculté de psychologie à 18 ans. Évitant soigneusement les autres membres de sa promotion, elle se retrouva de nouveau confrontée à ce sentiment de rejet, à ce regard à la fois interrogateur et méprisant sur sa personne. De nouveau, on la trouvait étrange, mais dans le fond, elle s’en fichait. Ce qui comptait pour elle ? Réussir ses études et sa vie professionnelle. Rien de plus. Elle n’avait jamais réessayé d’avoir une quelconque relation amoureuse, et sachant qu’elle risquait à nouveau de paniquer, n’avait jamais tenté non plus d’avoir une quelconque relation amicale.. Lorsqu’elle était forcée de travailler en binôme, elle se parait du masque de la froideur et du professionnalisme, ne dépassant jamais la relation d’étudiant à étudiant. Six années plus tard, diplôme en poche et âgée de 24 ans, Yan se lança à corps perdu dans sa nouvelle profession. Psychologue. Le chemin avait été long pour elle, mais elle était devenue une femme équilibrée, qui savait gérer sa pathologie seule. Elle avait cessé de voir sa psychologue à l’âge de 19 ans, et se portait parfaitement bien. Cette année-là, elle se fit tatouer les prénoms de ses parents sur la nuque, et commença à travailler dans un cabinet avec trois autres psychologues. Il fallut attendre une année de plus pour que Yan se décide enfin à quitter le domicile de ses parents.. « Nous sommes si fiers de ce que tu es devenue, Yan.. Si fiers.. » Les larmes aux yeux, Xiang aidait sa fille à mettre une dernière touche de décoration de l’appartement dans lequel elle venait d’aménager, quittant ainsi le nid familiale « Tu es devenue une femme forte. Indépendante.. Avec une bonne carrière.. Et regarde-moi cet appartement, un véritable petit nid douillet ! La maison fera si vide sans toi, ma chérie.. » Un sourire, et Yan déposa un baiser sur la joue de sa mère « Mais voyons, je viendrais vous voir souvent.. Ne croyez pas que vous arriverez à vous débarrasser de moi aussi rapidement.. » Elle alla dans la cuisine, prit une bouteille de champagne, ainsi que trois coupes et retourna dans le salon « Et nous avons quelque chose à fêter, aujourd’hui ! J’ai passé des tests, pour savoir si j’étais apte à travailler en milieu carcéral.. Et j’ai l’honneur de vous annoncer que ma candidature a non seulement été retenue, mais que j’ai reçu hier une réponse favorable ! Dès lundi prochain, je commencerais à travailler avec des détenus en liberté surveillée, ainsi qu’avec des ex-détenus tenus de suivre un suivi psychologique pendant au moins leur deux premières années de réinsertion.. ET ! La cerise sur le gâteau ! Le mardi, jeudi et vendredi, je devrais me déplacer dans diverses prisons pour assurer un suivi psychologique aux détenus incarcérés ! » Elle avait un énorme sourire.. Mais la nouvelle ne plu pas forcément à ses parents..
Yan avait trouvé sa voie, indéniablement. Elle excellait dans ce qu’elle faisait et était d’un professionnalisme impressionnant. Elle avait mis à contribution son absence de peur, pour être aux plus prêt d’hommes et de femmes ayant commis des atrocités qu’elle trouvaient fascinantes. A l’âge de 28 ans, elle était chargée de cas lourds. Meurtriers, violeurs.. C’était à elle qu’était confié le suivi psychologique de détenus jugés particulièrement dangereux. Se retrouver plaquée contre un mur, prise à la gorge, par un homme reconnu coupable d’homicide volontaire et de viol post-mortem aurait eu de quoi faire pâlir plus d’un professionnel.. Mais Yan restait toujours particulièrement stoïque. Et c’était cette neutralité qui faisait sa réputation. Elle savait y faire, c’était certain.. « Mademoiselle Matthews ? » Yan hocha la tête, en ce beau mois de Février 2011, laissant un homme entrer dans son bureau. Un de ses collaborateurs, qui poursuivit ; « Voici le dossier d’un nouveau patient pour vous. Un cas qui vous intéressera grandement, j’en suis particulièrement certain. » Yan eut un petit sourire, avant de se lever de son siège pour aller prendre le dossier et l’ouvrir « Une femme.. Vous me gâtez ! » Alors que ses yeux parcouraient le dossier, elle ne pu empêcher son sourire de s’agrandir « Mais dites-moi, vous commencez à connaitre parfaitement le genre de patient dont j’aime m’occuper. Multiples homicides volontaires, sur des mineurs de 16 à 18 ans, acte de barbarie, considérée comme tueuse en série.. J’ai déjà hâte de la rencontrer, ça semble être une femme particulièrement charmante ! » Un petit rire gêné de la part de l’homme « La prison dans laquelle Madame est incarcérée se trouve à deux heures de route de Londres. Vous serez tenue de la suivre à raison d’une fois par mois, le samedi matin. Bien sûr, elle sera ajoutée à votre planning rapidement. » Yan hocha la tête « Parfait ! Je vois que je dois faire une première rencontre ce samedi ? C’est parfait. »
Comme une gamine, Yan avait trépigné d’impatience jusqu’au jour J. Elle était persuadée que cette femme serait absolument fascinante ! Peu motivée à faire la route le matin même, elle s’était permise la folie de réserver une chambre d’hôtel du vendredi soir au dimanche matin, histoire d’avoir l’esprit tranquille pour cette première rencontre. Ce fut donc le vendredi 18 février 2011, à 18 heures – juste après sa dernière consultation à son cabinet, en suivi psychologique d’un homme libéré de prison quelques mois plus tôt – qu’elle prit la route, chargeant son petit sac de vêtements pour le week-end. AC/DC à fond dans la voiture, elle roula, empruntant des petites routes de campagnes. Même si cela était plus long, elle préférait la tranquillité de ces routes. Ce fut une brume, épaisse, qui lui fit regretter son choix.. Sur la chanson « TNT » elle dû ralentir l’allure et mettre ses phares en marche. Puis, elle s’engagea dans la brume. Il lui sembla rouler longtemps.. Trop longtemps dans cette brume où elle ne voyait rien – et elle sentit qu’elle roulait sur un chemin de terre, ce qui la perturba légèrement - juste avant que le moteur ne lâche un bruit qui ne plu absolument pas à Yan « Ah non, tu ne me lâche pas maintenant, toi. J’ai réservé l’hôtel pour 21 heures, me fait pas le coup de caler, je ne veux pas me retrouver à la rue ce soir.. » Mais la voiture ne sembla pas être très réceptive à la demande de sa propriétaire.. Et, encore quelques mètres, avant de caler joliment. « NAN ! Saleté de voiture ! Mais redémarre.. Allez.. » Impossible de la faire redémarrer. Yan s’adossa complètement contre le dossier, la musique se coupant elle aussi. Légèrement agacée, elle attrapa son portable dans la poche de sa veste et eut un rire qui n’avait rien de joyeux en voyant qu’elle n’avait aucun réseau. Il allait falloir marcher et le savait. Peut-être y avait-il une âme généreuse au bout de ce chemin pour l’aider à faire repartir sa voiture ? Qui ne tente rien, n’a rien, après tout..
Elle s’engagea donc et marcha un peu. Le froid l’enveloppait doucement, et elle referma son long manteau, pestant contre le chemin de terre et ses talons aiguilles qui s’y enfonçaient.. Et puis, là, au loin ! Elle aperçue quelqu’un et trottina vers cette personne. Louve Carter, disait-elle s'appeler.. Yan demanda de l’aide mais reçu des explications alambiquées à la place.. Soit.. Comme le lui avait indiqué cette drôle de femme, l’anglo-chinoise avait continué de marcher, jusqu’à arrivée à la place centrale de la ville. Une ville qui semblait coincée dans un temps lointain.. Une extravagance qui laissa Yan légèrement perplexe.. On lui indiqua une auberge et d’autres personnes tentèrent de lui expliquer la situation.. Mais Yan n’y cru tout simplement pas.. « S’il vous plait.. Je dois vite repartir, pour le travail et j’ai vraiment besoin d’aide. Ma voiture est tombée en rade, si quelqu’un avait de l’essence ou une batterie – parce que ça a l’air d’être davantage un problème de batterie – je pourrais lui acheter ça. J’ai du liquide sur moi.. » Le sort semblait s’acharner sur Yan. Et face aux habitants étranges de cette petite ville, Yan dû abdiquer.. Elle passa la nuit à l’auberge et tenta de repartir le lendemain.. Mais, chaque fois qu’elle essayait de sortir de la brume, elle revenait inexorablement sur ses pas.. Pendant combien de temps essaya-t-elle de sortir du Comté de Duskwood ? Elle-même n’en avait aucune idée.. Mais elle se refusait à croire en la possibilité que les habitants disaient vrais.. Même lorsque l’évidence lui fut agitée sous le nez, deux ans plus tard, lorsqu’elle rencontra un homme qui affirmait qu’ils étaient désormais bel et bien en 2013..
Salut les gars ! En réalité, je m'appelle Marine mais sur le web on m'appelle Roween, Ploup, Stick.. Ça dépend de ce que je donne comme pseudo !. Actuellement j'ai 20 ans, et si j'ai bien regardé dans ma culotte je suis une demoiselle. Je me suis fait piéger sur Duskwood en écoutant les fondatrices m’en parler, et j'aimerai dire que le contexte est absolument génial *-*.
fiche par © anouk
Dernière édition par Yan A. Matthews le Dim 24 Nov - 21:18, édité 9 fois |
|